Philosophie : La Lumière – Pratique Dharana : Tratak
La Lumière occupe une place centrale tant pour le corps que pour l’esprit. La survie prolongée dans l’obscurité demeure impossible. Elle constitue l’essence des thérapies naturelles et des croyances ; apportant de la Joie et symbolisant la Vie.
En Occident, depuis des siècles, lors des nuits les plus longues de l’année, nous allumons des bougies, décorons des sapins, et éclairons rues et maisons pour rappeler l’attente de la lumière qui reviendra après le solstice d’hiver.
Dans la tradition indienne, la Lumière représente la connaissance (ne dit-on pas « je vois » pour signifier « j’ai compris » ?), la pureté, l’équilibre (Sattva), la joie, la vision, le feu, la chaleur et la transformation (Rajas).
« Au cœur de l’obscurité : la Lumière »
Lorsque tout va bien, nous faisons assez aisément face au quotidien, sans forcément de remise en question. Lorsque la vie devient anxiogène, les nouvelles nous confrontent à nos propres vulnérabilités et nous ramènent exactement là où nous sommes, face à nos failles et nos limites.
« Il fait nuit dans le monde, Il fait nuit en mon cœur, Où est le Soleil intérieur ? »
Face aux difficultés, du fait des interactions et de l’interdépendance, le monde se reflète en mon être : je suis mis.e à l’épreuve. Je suis pris.e dans un Karma (loi de cause à effet) de groupe, celui de l’Humanité.
Est-ce une fatalité ?
- Oui, dans le sens que je suis membre de l’Humanité, et …
- Non, car je conserve mon libre-arbitre. Mais il n’est pas facile de voyager à contre-courant.
Cultiver la Lumière devient un choix conscient dans le vaste jardin du Monde où pousse ce que nous y plantons.
Dans l’écho de la dualité, le Jardin intime qui est nôtre se dessine de nos pensées et de ce qui émane de notre cœur. Autant que possible, nous pouvons y semer des pensées lumineuses, délicatement nous déracinons les mauvaises herbes, repérables grâce à la sérénité cultivée dans nos pratiques de yoga. Notre ardeur dans la pratique nourrit la terre de ce jardin, préparant son repos hivernal pour qu’il renaisse fertile. Nos pensées, comme des graines, éclosent en actions. Nous pouvons ainsi agir consciemment pour qu’elles fassent Sens et qu’elles induisent toujours plus de Cohérence dans nos existences respectives et collectives.
Nul sentiment de naïveté à cela. Une démarche sincère, profonde et Vraie, même au cœur de l’Obscurité la plus sombre.
Le Monde est la somme de tout ce qui existe sur Terre. L’Humanité est la somme de tous les êtres humains. Plus nous serons nombreux à cultiver notre jardin de Lumière, mieux le Monde ira. Le Yoga nous encourage sur ce chemin.
Tratak :
Depuis des siècles, les yogis proposent la pratique de Tratak.
Selon la Hatha Yoga Pradipika, il existe six actions de nettoyages internes, préalables à l’approfondissement du Pranayama, puis de la Méditation. Deux d’entre elles, au moins, sont directement liées à la lumière. Ce sont Kapalabhati (« respiration du crâne qui brille »), et Tratak, la fixation d’un point de concentration. En plus de leurs effets physiques et psychiques évidents, ces deux pratiques affinent et renforcent les plans énergétique et spirituel.
On le sait : le flot des pensées agit en permanence sur le cerveau. Ainsi, jusqu’à 80 % de notre énergie est dépensée en un trop plein de pensées, allant même jusqu’à déséquilibrer le système nerveux central.
La pratique régulière de Tratak conduit à un plus grand calme intérieur, aidant ainsi à se débarrasser des pensées parasites que suscitent l’anxiété ou l’hyperactivité. Pratiqué sur la durée, Tratak améliore le niveau d’énergie global.
Comment se pratique Tratak ?
Par définition, Tratak est une technique de concentration de l’attention sur un seul point, ou sur la flamme d’une bougie, sans cligner des yeux (ou le moins possible).
Il y trois types de Tratak :
1- Tratak interne (antaranga)
Le Tratak interne consiste à fermer les yeux et à porter l’attention concentrée sur le troisième oeil. Au début, on peut ressentir de la difficulté à maintenir l’attention sur ce point, ou encore une douleur ou de la chaleur dans la tête. Il convient de ne surtout pas générer de tension physique. En restant détendu, progressivement, ces symptômes devraient s’estomper. Il devient alors plus facile de porter toute son attention en ce point.
Bienfaits : Le Tratak interne développe la force psychique, la confiance, la clarté mentale et la patience. Il dissipe les pensées et tendances négatives, au profit de plus de paix intérieure.
2- Tratak médian (bahiranga)
Le Tratak médian consiste à concentrer le regard et l’attention sur la flamme d’une bougie. Si les yeux commencent à brûler, on les ferme pour un temps, en contemplant intérieurement l’image rémanente de la flamme (phosphène), jusqu’à ce qu’elle disparaisse. Puis on répète encore ce processus à deux phases. On place la flamme de la bougie à une distance de 50 à 80 centimètres des yeux, à la hauteur des yeux, afin de ne pas créer de tension, ni de pression, dans la nuque. Ce type de Tratak est idéal lorsque la durée d’ensoleillement est faible et les nuits sont longues. Il contribue à cultiver la lumière intérieure.
Bienfaits : La visualisation de la flamme de la bougie stimule les glandes lacrymales, améliore la concentration, la mémoire et la force mentale. A côté de cela, Tratak contribue à améliorer l’efficacité et développe la clarté mentale, ainsi qu’une forme de lumière intérieure, ou charisme, ou encore l’intuition.
3- Tratak externe (bahiranga)
Le Tratak externe peut être pratiquée en tout temps, jour et nuit, en concentrant le regard et l’attention sur un objet, tel que le soleil, la lune, une étoile, un petit point, le bout du nez, un objet brillant, à condition que l’état de la vue permette cet exercice.
Bienfaits : Permet de se sortir des déséquilibres du mental, améliore la motivation et la capacité d’anticipation.
A noter : La pratique de Tratak avec le soleil nécessite des précautions évidentes pour préserver la rétine. Il se pratique juste après le lever ou juste avant le coucher du soleil, pendant max. 10 minutes.
- Parce que la pratique de Tratak requiert un mental paisible, il est bon de, tout d’abord, s’assoir le dos droit, en respectant les courbures physiologiques du dos, et de prendre un temps pour pratiquer plusieurs minutes la respiration consciente, lente et régulière, tout en laissant de côté les pensées négatives ou à basse vibration. Sinon, Tratak ne sera pas aussi efficace.
- Pour s’engager pleinement dans la pratique, il convient idéalement de la répéter à heure régulière, toujours au même endroit, avec patience et concentration.
- Parmi les trois types de Tratak, choisir celui qui vous convient le mieux et pratiquer tous les jours pour une durée égale ou supérieure à celle du premier jour. Rester immobile, comme une statue, tout du long de la pratique (Kaya Sthairyam).
Tratak opère une véritable pacification intérieure. La présence à l’instant est totale et l’état de conscience s’en trouve élargi.
Pour que Tratak devienne une véritable Sadhana, on dit qu’il est bon de le pratiquer régulièrement, au moins 21 jours ou jusqu’à 3 mois, à raison de 15 minutes par jour (assise préalable comprise).
Tratak avec une bougie est particulièrement efficace. Au bout de quelques minutes de pratique, tout se passe comme si la lumière nous éclairait de l’intérieur. On dit que cet exercice opère une réelle purification: les scories émotionnelles et mentales sont comme brûlées par la flamme…
Si vous avez de la peine à dormir, allumez une bougie et asseyez-vous quelques minutes devant, pour faire Tratak, juste avant de vous coucher. La qualité de votre nuit pourrait en être grandement améliorée.
Contre-indications : En cas de maladie cardiaque ou de maladie oculaire, s’abstenir de pratiquer Tratak.
2nd art : Claudia Ramirez on Unsplash